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Kill de Nikhil Nagesh Bhat : la bombe prête à faire sauter Bollywood

Stella Parisi

Dernière mise à jour : 29 déc. 2024

Os qui craquent, artères qui giclent, membres qui se déchirent... Kill compose une symphonie mélodieusement jouée dans un opéra de brutalité qui ne manquera pas de ravir vos oreilles. Si la vue de quelques (centaines de) litres de sang ne suffit pas à vous révulser, ce thriller d’action indien est fait pour vous.


On fait la connaissance d’Amrit, héros impitoyable et paradoxalement sentimental, monté à bord d’un train pour suivre sa fiancée (Tulika, jouée par Tanya Maniktala) que son père a promise à un autre. Il compte bien la demander en mariage avant son rival, ce qu’elle acceptera, désobéissant ainsi à son paternel par amour pour son bien aimé. Alors que tout semble aller pour le mieux dans leur idylle, des dacoïts (voleurs armés sévissant dans des trains) commencent à piller et à terroriser les voyageurs, sans savoir que deux commandos des forces spéciales surentraînés et prêts à en découdre se trouvent dans le même train. S’en suivra alors une lutte acharnée et sanguinaire entre ces deux clans rythmée par des chorégraphies confinées entre les quatre murs du train.


Une des grandes qualités du film est son acteur principal, Laksh Lalwani, qui s’inscrit comme une révélation. Le mannequin et acteur de séries fait sa première apparition au cinéma, et il semblerait que le pari soit réussi. Il interprète un héros froid, impitoyable et charismatique comme on aime voir dans la tradition des films d’action. Il est en colère et il entend le crier au monde entier : il compte bien se venger des injustices qu’il a subi en faisant payer aux criminels leur affront. On y croit à cette haine vengeresse furieuse, lorsqu’il se déplace on s’écarte de son passage et à chacun de ses pas, le train semble frémir sous ses pieds. On devine également que le réalisateur ne l’a pas choisi uniquement pour ses talents d’acteur : sa casquette de mannequin ne semble pas être complètement étrangère à ce choix. Entre gros plans sur son regard enflammé et plans américains sur ses muscles congestionnés après les bagarres, Nagesh Bhat sait comment mettre en lumière ses acteurs sous leurs meilleurs angles. C’est toujours appréciable de contempler le travail d’un cinéaste qui sait mettre en scène ses acteurs et qui élève leur corps au stade d’œuvre d’art à part entière.



Cependant, bien qu’il s’inscrive assez clairement dans la lignée des films d’action hollywoodiens, Kill semble être un OVNI pour ses contemporains indiens. En exhibant une brutalité outrancière et sans limites qui ravira les amateurs d’hémoglobine, on est bien loin de la violence censurée à laquelle nous a habitué Bollywood. Il est bien plus naturel de faire le rapprochement avec les scènes horrifiques et sanglantes des zombies coréens de Last Train to Busan qu’avec son cousin bollywoodien Chennai Express. S’il se détache de ses congénères dans la partie action, Kill y reste tout de même très attaché du côté émotionnel: avec son lot de scènes mélodramatiques, on ne peut qu’être touchés par la romance qui surplombe l’histoire et motive notre héros à commettre de telles folies sanguinaires.


C’est bien rythmé, c’est divertissant (malgré un pitch de départ assez simpliste) et c’est beau, autant dans l’utilisation d’effets extrêmement crédibles gommant tout aspect artificiel, que du côté purement esthétique de la photographie et des décors. Prenons la scène de la course effrénée en slow-motion de Tulika à travers les wagons quelques instants avant que les brigands lui fassent connaître un sort funeste. On est éblouis par la vivacité de la couleur violette de son sari qui resplendit à travers une lumière bleutée émanant des sièges autour d’elle. Toutes ces couleurs vives et cette symétrie résonnent en harmonie avec l’intensité de la situation de la jeune femme à cet instant. L’esthétique enivrante et presque irréelle de cette scène nous transporte et nous fait presque regretter que le temps ne se soit pas arrêté pour pouvoir contempler sa beauté quelques instants de plus.


Chad Stahelski, réalisateur de la saga John Wick (personnage avec lequel Amrit est souvent comparé), prévoit déjà un remake du film d’action indien tant il fût conquis par son originalité et la qualité de sa mise en scène et ne cache pas son excitation de collaborer avec Nagesh Bhat. Il le qualifiera d’ailleurs de « vif », « sauvage » et « créatif ». Et on le rejoint sur ces trois points. Un film qui ne manque pas d’installer une atmosphère intense très particulière, aidée par les décors qui confinent toute la rage et la violence des deux clans ennemis entre les quatre murs du train. Au fur et à mesure que les minutes s’écoulent, les murs semblent se resserrer sur Amrit, nous donnant ainsi la sensation d’une bombe à retardement prête à exploser et à laisser abattre son courroux sur ses malfaiteurs. Lorsque les malfrats s’en prennent à sa bien-aimée, le volcan entre en éruption, et personne n’y échappera. Pas même le spectateur.



Stella Parisi

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